Le lexique de la nouveauté dans les livres de famille florentins (XIVe-XVe siècles)

Mots et usages d'une catégorie historiographique

Le lexique de la nouveauté dans les livres de famille florentins (XIVe-XVe siècles)

Le lexique de la nouveauté dans les livres de famille florentins

(XIVe-XVe siècles)

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À partir du xive siècle, des générations de pères florentins ont pris la plume pour transmettre à leurs descendants tout ce qu’ils estimaient bon et utile pour l’avenir de la famille[1]. Ces écrits privés – appelés ‘livres de famille’, ricordi, ou ricordanze – forment un corpus hétérogène à certains égards mais cohérent dans son circuit de communication (par, pour et dans la famille) et dans son approche résolument pragmatique. Les 150 livres environ qui nous sont parvenus pour la période 1300-1480 proviennent dans leur très grande majorité de la moyenne et de la haute bourgeoisie florentine[2], et constituent donc de possibles sources pour interroger la diffusion et la pénétration dans ces milieux des représentations supposées caractériser les Renaissances. Certains pères de famille entretenaient des rapports cordiaux avec les humanistes, auxquels – pour les plus fortunés – ils confiaient parfois l’éducation de leurs enfants. Christian Bec est d’ailleurs allé jusqu’à affirmer : « Hommes d’affaires et humanistes florentins ont tout en commun : mode de vie, préoccupations, idéaux[3] ». C’est à partir des livres de famille de ces Florentins – et en particulier du corpus formé par leurs réflexions sur les affaires de la cité – que j’ai souhaité interroger la pertinence de cette affirmation, et guetter en particulier l’apparition – ou non – d’un imaginaire du « renouveau » politique – au sens large – ou de « temps nouveaux » entre l’aube du XIVe siècle et le crépuscule du XVe.

Disons-le d’emblée : le terme « rinascita » n’apparaît jamais, et les occurrences de modernità ou moderno sont non seulement très rares, mais toujours associées, en balancement, au pôle opposé de l’antico[4]. Ce dernier, nettement plus présent dans le corpus, désigne parfois l’Antiquité et ses représentants, mais plus souvent les ancêtres, ce qui est ancestral, et l’ancienneté du lignage – sans qu’il soit toujours possible de distinguer entre ces diverses acceptions, ce qui confirmerait la prédominance d’un sentiment de continuité entre passé et présent, continuité qui est du reste l’enjeu même de l’écriture des livres de famille[5]. Dans ce corpus, les chemins de la « novità » ne mènent pas à l’imaginaire du « renouveau » humaniste. Convient-il alors de distinguer nettement, pour le Tre et le Quattrocento, entre une ‘renaissance’ de l’éloquence et une ‘renaissance’ politique, comme le suggérait par exemple déjà Martin Mc Laughlin dans un article de 1988[6] ?

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Panorama des acceptions

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Les 66 occurrences du substantif novità et les 192 occurrences de nuov* (réparties entre l’adjectif, l’adjectif substantivé la nuova (notizia), la locution adverbiale di nuovo, l’adverbe nuovamente) présentes dans le corpus correspondent aux principales acceptions des dictionnaires anciens. Largement héritées du latin, ces acceptions peuvent être réparties en 4 pôles principaux :

1)Ce qui est récent, frais, jeune, qui vient d’apparaître, comme la lune nouvelle ou le vin nouveau. Cette fraîcheur peut être connotée positivement, notamment quand il s’agit de souligner l’absence d’usure ou de dommages liés au passage du temps, mais elle peut aussi être associée à une forme de simplicité ou d’inexpérience[7].
2)Ce qui est nouveau ou récent par rapport à une forme précédente ou préexistante de la chose considérée (le nouveau, alors parfois entendu au sens de moderne, s’oppose alors à l’ancien, ou bien se présente comme une réitération – sous une forme modifiée ou non – de l’ancien[8]). Dans le sens socio-politique de cette acception, les hommes ou les lignages « nouveaux » par leur réussite, leur richesse, leur noblesse etc. s’entendent par contraste aux lignages anciens. Notons que l’emploi souvent péjoratif de cet adjectif place cette « nouveauté » du côté d’un changement qui n’est pas le bienvenu (et partant, de l’acception suivante)[9].
3)Ce qui étonne par son caractère inattendu, insolite, inédit. Cette nouveauté plus radicale – qui va de pair avec une forme de surprise – présente des connotations parfois positives (quand l’extravagance, l’écart à la norme est source d’une surprise qui n’est pas désagréable, et vient varier de l’ordinaire sans en bouleverser les fondations[10]) mais bien souvent négative, quand elle provoque un étonnement qui ressort soit d’un problème d’intelligibilité des faits soit d’un bouleversement plus profond de la norme[11]. Pour le dire avec le dictionnaire Tommaseo « dicesi d’ogni minima mutazione che non piaccia, o non se ne intenda ben la ragione. »
4)C’est à cette dernière acception que l’on peut rattacher l’usage de novità qui domine largement dans le corpus, pour désigner une attaque plus ou moins violente et concrète contre une personne, un gouvernement, un ordre établi[12]. Cet emploi est ancien, puisque d’après le dictionnaire Gaffiot, les res novae désignaient déjà chez Cicéron ou César des changements politiques, des révolutions.

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Étude de cas : Giovanni di Pagolo Morelli

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C’est chez Giovanni di Pagolo Morelli que l’on trouve le plus d’occurrences du lexique de la novità, dans quasiment toutes les acceptions identifiées ci-dessus[13]. Il manifeste par ailleurs des tendances clairement « philo-humanistes » en matière d’éducation des enfants[14]. Chez Morelli, la nouveauté politique est évoquée sous une forme plutôt neutre dans 5 occurrences de l’adjectif « nuov* », pour désigner l’ouverture d’un nouveau cycle politique (inscrit dans les usages, donc) : ainsi de l’élection d’un nouvel empereur, de la nouvelle seigneurie de Pise et d’un nouveau pape, « nuovo pastore » appelé à « riformare la Chiesa ». L’idée de réitération d’une forme précédente, plus ou moins changée, que contient le préfixe ri- (re) est par ailleurs très souvent présente en conjonction avec les 9 occurrences de la locution adverbiale « di nuovo » (de nouveau), utilisée pour décrire la réitération d’une action dans le cadre d’opérations militaires, diplomatiques ou de politique intérieure. Le pôle sémantique du « nouveau » comme élément inédit et étonnant est également présent deux fois chez Morelli, sous une forme connotée négativement : on s’affronte dans sa cité sous de nouveaux prétextes (« sotto nuove coverte »), et ses enfants doivent se méfier de ceux qui voudront les discréditer par des voies et des pièges nouveaux (« per nuove vie e tranelli »).

C’est cependant du côté du substantif « novità » que la sémantique du changement comme bouleversement malvenu est le plus perceptible. Pour Morelli, comme pour les autres auteurs du corpus, novità désigne un bouleversement comprenant une dimension conflictuelle, puisqu’on le trouve associé à la guerre, dans des expressions comme « guerre e altre novità[15] ». Mais une forme plus générique de novità se trouve aussi chez d’autres auteurs (antérieurs comme postérieurs), associée à la notion de mutazione, de changement (politique ou non). La sémantique du substantif novità se déploie ainsi principalement dans deux directions, qui ne s’excluent pas : l’action concrètement violente, dirigée contre une ou plusieurs personnes d’une part ; un bouleversement politique ou institutionnel, également voué à modifier durablement la situation, d’autre part.

Les nombreuses révoltes évoquées dans le corpus se situent à l’intersection de ces deux axes : il s’agit alors bien d’actions venant bouleverser l’ordre établi, pour introduire une nouveauté plus radicale, mais en aucun cas cette nouveauté n’est perçue comme l’aube de temps meilleurs, ou inscrite dans la perspective d’un « renouveau » né d’une volonté de ré-actualiser des formes politiques antiques. Chez Morelli, et dans les écrits privés des Florentins des XIVe et XVe siècles, les ‘nouvelletés’ demeurent des perturbations de la tranquillité et de l’ordre auquel les citoyens aspirent. Elles brisent le cycle politique auquel ces pères sont habitués, d’où la surprise présente dans la sémantique du terme, symptôme de la crise d’intelligibilité du présent politique qu’induisent ces bouleversements.

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Des usages en évolution ?

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À l’échelle de l’ensemble du corpus examiné, on constate peu d’évolution durant la période considérée. À part l’adverbe « nuovamente », qui apparaît sous la plume de Salviati au début du XVe, puis épisodiquement chez des auteurs postérieurs, toutes les formes et les acceptions de nuovo-novità sont déjà présentes chez les auteurs de la première moitié du XIVe. La répartition des occurrences ne met pas en évidence une augmentation du nombre d’occurrences du lexique de la « nouveauté » au fil du temps, au contraire : la plupart se réfèrent plutôt au dernier quart du XIVe et au premier quart du XVe. Toutefois, cette remarque doit être nuancée par la tendance globale des pères de famille du XVe siècle à se détacher, voire à se désintéresser de la transmission d’informations sur la vie de la cité dans leurs livres privés[16]. Cela éclaire peut-être la surreprésentation chez Salvestro Mannini du substantif « nuova » au sens de notizia (14 occurrences, pour une seule occurrence de novità) : il enregistre les informations qu’il reçoit, se représentant dans une posture de spectateur plutôt que d’acteur. Cette posture se retrouve chez Bartolomeo del Corazza, qui décrit minutieusement les cérémonies auxquelles il assiste. Les occurrences de l’adjectif « nuovo » que l’on trouve sous sa plume relèvent souvent de l’attention – teintée d’émerveillement – portée à ce qui sort de l’ordinaire (notamment au niveau des costumes), ou à la répétition de certains gestes dans le cadre de ce cérémonial. Cependant, il l’emploie aussi pour pointer le caractère singulier, inédit de certaines actions politiques (comme l’évasion de Jacopo da Carrara « per nuovi modi »). La répartition des occurrences dans le corpus reflète ainsi globalement le volume de notes sur la vie de la cité présentes dans les livres de ces Florentins. Les écrits de Guido Monaldi (1305 ca-1381 ca) constituent un cas particulier en raison de la fréquence des occurrences par rapport au volume de notices qui nous sont parvenues, mais cela peut tenir au fait que nous ne connaissons ce texte que par le biais de transcriptions postérieures et partielles[17]. Même chose pour les écrits de Jacopo Salviati[18], chez qui on remarque cependant une sensibilité particulière à la temporalité politique, qui se traduit par l’apparition et la répétition de l’adverbe « nuovamente » (4 occurrences, à propos de l’élection de l’empereur, du pape, et de la liberté « nuovamente acquisita » de la commune de Bologne en 1411), mais aussi par l’emploi de l’adjectif nuov* et de la locution adverbiale pour marquer la succession et souvent la répétition des étapes et des formes de l’agir politique. L’expression « tempo nuovo » (la nouvelle saison, propice à la reprise des campagnes militaires), revient cinq fois, ce qui est conjoncturel mais dénote aussi une attention marquée pour la temporalité « bonne » de l’action politique.

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Un ‘élément de langage’ médicéen

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Au niveau de la répartition des acceptions, aucune tendance ne se dégage nettement, même si l’on peut identifier quelques usages particuliers, voire orientés, de ce champ lexical. Le cas des 8 occurrences de novità que l’on rencontre dans les 4 feuillets et demi de ricordi de Côme de Médicis qui nous sont parvenus est éclairant à cet égard[19]. En effet, alors que les opposants des Médicis et les historiens nous apprennent que les remous de 1433 (qui ont mené au bannissement des Médicis) se sont déroulés sans aucune violence physique[20], Côme mobilise dans son récit la connotation violente du terme pour « colorer » son témoignage et en orienter la réception. Selon Côme, dès le tirage au sort des noms des Prieurs de septembre 1433 « on commença à murmurer que durant leur mandat on ferait des nouvelletés dans la ville[21] ». Or à Florence, les bruits de la cité sont synonymes de danger, d’un soulèvement à venir, comme celui des Ciompi en 1378. Plus loin, le terme « nouvelletés » est associé à la violence par trois fois, quand Côme évoque la possible attaque de Niccolò da Tolentino pour le délivrer[22], action qu’il refuse au nom de l’honneur et du respect des procédures républicaines. Cela se retrouve dans le récit de son retour d’exil en 1434, qu’il décrit comme conforme aux volontés de la Seigneurie et aux usages de Florence[23] : il aurait ainsi changé d’itinéraire « pour ne pas faire un plus grand tumulte dans la ville[24] », et à leur arrivée, Florence « était pacifiée, bien qu’un bon nombre de soldats armés stationnent continuellement sur la place et au Palais [de la Seigneurie] pour la sécurité du Palais[25] ». Les armes, présentes, disent la violence potentielle mais Côme insiste sur le fait que la tranquillité de la cité est désormais assurée : la sécurité et la paix contrastent ainsi d’autant plus vivement avec la violence des divisions internes à la cité soulignées dans les lignes qui précèdent. Le récit de Côme se clôt sur un passage de relais : la situation extraordinaire se termine avec l’expiration de la balìa et l’élection d’une nouvelle seigneurie, qui marque l’ouverture d’un nouveau cycle politique « ordinaire » et un retour à la norme « en usage avant les nouvelletés »[26], qui apparaît comme l’horizon ultime de l’action politique bonne.

Cet usage « orienté » du terme novità se retrouve sous la plume d’autres médicéens. D’abord chez son petit-fils Laurent, selon qui Côme aurait même été malmené en 1433[27], et qui désigne la tentative de renversement de la faction médicéenne qui eut lieu en 1466 par le syntagme « parlamento e novità del 1466 » (conjuguant ainsi la sémantique de l’action politique extraordinaire – dénotée par l’emploi de parlamento – avec la sémantique du bouleversement et de la violence potentielle qui accompagnent l’emploi de novità[28]). Dans le sonnet que Jacopo Cocchi Donati, un fervent partisan des Médicis écrit pour Pierre de Médicis, et qu’il recopie dans son livre privé, les novità (comme celle de 1466) deviennent même synonymes de menace pour l’état de la cité (lequel se confond, pour Jacopo, avec celui des Médicis [29]) :

Quando ripenso Piero ad hora ad hora

del sommo et vero Dio la gran pietate

che da sì manifesta crudeltate

ci abbia salvato, resto di me fora

Poi dicho ben doverci ciaschedun hora

dar gloria alla tua immenza caritate

ne giamai più offendere tua bontate

infin ch’escha del corpo l’alma fora

Hora perch’egli è sentenzia certa et vera

e ssta di maggiore lode reggier giusto

che acquistato aver felicemente

Vogli ciascun con la mente sincera

adirizare a questo ogni suo gusto

se non vuol novità vedere sovente.

per Dio abbiasi a mente,

che s’una volta ci venissi errato,

Firenze perderia suo bello stato[30].

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L’analyse des occurrences du substantif novità et de nuov* dans le corpus des livres de famille florentins (1300-1480) montre que, dans la sphère socio-politique, la nouveauté reste synonyme de perturbation, volontiers violente, d’un ordre établi dont on espère plutôt le maintien, gage de tranquillité. Les auteurs de livres de famille des XIVe et XVe siècles ne semblent ainsi pas (ou pas encore) concevoir leur temps comme une époque marquée par une radicale nouveauté sur le plan de la vie de la cité, contrairement à ce que l’on trouvera sous la plume d’auteurs actifs après le début des Guerres d’Italie[31], et encore moins comme une époque de potentielle « renaissance » d’institutions antiques. Alors que le succès de Boccace et ses émules, comme Franco Sacchetti, témoigne du goût des Florentins pour la nouvelle – où les anecdotes sortant de l’ordinaire figurent en bonne place – il semble en aller autrement quand on sort de la sphère littéraire et culturelle pour entrer dans la sphère politique et sociale. Là, c’est la continuité et une temporalité cyclique qui paraît valorisée, et quand un cycle politique est menacé ou brisé par quelque « nouvelleté », alors c’est la tranquillité de toute la cité qui est menacée, en même temps que la norme, l’ordre établi. Dans cet espace extra-ordinaire, perturbé, c’est en effet aussi l’intelligibilité des circonstances et, partant, l’action politique prudente qui semble se trouver compromise, mettant à mal les efforts de générations de pères attachés à produire et à transmettre à leurs descendants un recueil d’expériences utiles à cette fin, au moyen – entre autres – de leurs livres de famille. Alors que l’imaginaire du « renouveau » des lettres antiques permet aussi aux humanistes de se dire, de définir leur place dans la société de l’époque, c’est sur la continuité et sur la mémoire sans cesse ré-actualisée de faits passés que les familles florentines construisaient leur identité et revendiquaient une place dans la société : rien d’étonnant donc à ce qu’ils n’adoptent pas – au xve du moins – la posture des lettrés humanistes, bien qu’ils les fréquentent et soient attentifs à leurs discours. À la lumière de cette modeste enquête lexicographique, on pourrait penser que si les pères de famille florentins sont sensibles à quelque chose dans le discours du « renouveau », c’est peut-être avant tout au préfixe « re » (ri) ; mais pour en avoir le cœur net il conviendrait d’étudier spécifiquement les emplois de ce préfixe, ce qui est une autre enquête !

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Élise Leclerc

Université Grenoble Alpes / Luhcie

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  1. Sur ces écrits, voir les synthèses de C. Cazalé-Bérard et C. Klapisch-Zuber, « Mémoire de soi et des autres dans les livres de famille italiens », Annales HSS, 59/4, 2004, p. 805-826 et R. Mordenti, I libri di famiglia in Italia, II, Geografia e Storia, Rome, Edizioni di Storia e Letteratura, 2001.

  2. Cette distribution sociale tient aux modalités de conservation de ces documents mais aussi au rapport des différents milieux à l’écriture mémorielle (voir à ce sujet A. Stella « Les Ciompi et leurs familles », Médiévales, 19, 1990, p. 65-70 ; F. Franceschi, « La mémoire des laboratores à Florence au début du xve siècle », Annales ESC, 45/5, 1990, p. 1143-1167). Pour une présentation du corpus et du profil socio-professionnel et culturel des auteurs, je me permets de renvoyer aux annexes de ma thèse de Doctorat : Elise Leclerc, Affaires de familles et affaires de la cité : la transmission d’une pensée politique dans les livres de famille florentins (XIVe-XVe), sous la dir. de J.-C. Zancarini, Ens de Lyon, 2013.

  3. Ch. Bec, Le marchands écrivains à Florence (1375-1434), Paris-La Haye, Mouton, 1967, p. 368. Bec s’inscrit dans ce chapitre dans le sillage de l’enquête de Lauro Martines (1963). Depuis, la question de l’éducation des enfants de ces familles a été étudiée par Robert Black sur la longue durée (Education and Society in Florentine Tuscany. Teachers, pupils and schools, 1250ca-1500, Leiden, Brill, 2007).

  4. Par exemple, chez Bonaccorso Pitti : « […] poco dinnanzi alla sua morte avea veduto ch’egli avea arse assai carte e scritture. Comprendemmo assai chiaro che dicesse il vero, però che tutta la casa cercammo e niuno libro né scrittura vi trovammo, né antica né moderna. Andunche apparve chiaro che il detto Ciore fosse di malvagia condizione a non volere che di lui né de’ suoi antenati rimanesse alcuna scrittura ch’ egli avesse nelle mani. » (in Mercanti scrittori, éd. V. Branca, Milan, Rusconi, 1986, p. 350-351).

  5. Giovanni Morelli, ibid., p. 198 : « Appresso, udirai da lui certi casi avvenuti alla città tua, certi consigli dati per valenti uomini, certi rimedi presi, utili e buoni, e certi presi di danno e di vergogna; e nel suo novellare, volendoti ricordare per informazione di te, ti ricorderà molte cose antiche le quai egli arà vedute o veramente udite o lette ne’ libri de’ romani o d’altri poeti o valenti uomini che hanno iscritto. E così ti conterà cose avvenute a lui, o nella persona o nell’avere, o per difetto di sé o d’altri, o ne’ fatti del Comune o nella mercantia o in altri casi che dà il mondo, o veramente cose avvenute a’ suoi antichi, i rimedi dati da loro, o da cui aranno ricevuto premio e servigio, o da cui aranno ricevuto diservigio, chi è stato amico ne’ loro bisogni e chi è stato contradio, e le vendette fatte pe’ loro e’ meriti renduti a chi e’ sono tenuti; e così in molte cose ricordate dal padre se ne piglia dal figliuolo esempro e tengonsi bene a mente. »

  6. Martin L. McLaughlin, « Humanist Concepts of Renaissance and Middle Ages in the Tre- and Quattrocento », Renaissance Studies, 2/2, 1988, p.131-142. Dans cet article, le chercheur mobilise surtout Dante et Pétrarque, et se concentre sur le versant culturel de l’humanisme.

  7. Cette dimension n’est pas vraiment présente dans le corpus, contrairement à ce que l’on trouve à la même époque dans des sources narratives, comme les Trecento novelle de Franco Sacchetti (voir P. Nicou, « L’adjectif nuovo chez Sacchetti et le renversement comique du monde » in L. Baggioni, S. Trousselard dir., En traduisant Franco Sacchetti. De la langue à l’histoire, Paris, Classiques Garnier, 2021, p. 63-82).

  8. Rentrent dans ce cadre les occurrences de « fiorino nuovo » (expression qui finit par être lexicalisée) et de Mercato Nuovo (nom propre qui a été sorti du corpus). Dans le domaine politique, on trouve aussi le syntagme « nuovi priori » ou « priori nuovi », qui font référence au cycle régulier des mandats républicains.

  9. « E veggio essere entrati nel nostro reggimento, per difetto de’ detti maggiori, due condizioni di cittadini, ciò è gente nuova e molti giovani, i quali hanno preso tanto di baldanza, per la divisione che veggiono ne’ detti maggiori, che certo mi pare vedere che poco tempo possa passare, che questo stato non abbia grande mutazione » (Pitti, op. cit., p. 429).

  10. Cette dimension positive est absente du corpus politique, alors qu’elle est constitutive de certaines œuvres narratives de la même époque (comme le Décaméron de Boccace ou les Trecento novelle de Sacchetti, par exemple).

  11. « E nel detto nostro tempo addivenne la grande novità, che fu per tutta Italia, che tutti i popoli grandi e piccolini si vestirono di panno lino bianco, e andavano a gran brigate, coperto il capo e ‘l viso, gridando e cantando diceano a Dio misericordia e pace. » (Pitti, op. cit., p. 413).

  12. Dans ce contexte, « fare novità » signifie nuire (D. Trolli, « La lingua di Giovanni Morelli », Studi di grammatica italiana, ii, 1972, p. 51-153).

  13. Parmi les emplois marginaux, on trouve chez lui une fois nuova au sens de nouvelle (notizia), une fois tempo nuovo au sens de printemps (nouvelle saison plus propice au lancement d’opérations militaires) ; deux occurrences de sommes exprimées en « florins nouveaux », deux références à une sépulture nouvellement construite, et trois fois une mise en regard du nuovo par rapport à l’antico, à ce qui précédait (ex : lasciò l’amico vecchio per acquistarne uno nuovo ; nuove e vecchie prestanze).

  14. Morelli, op. cit., p. 192-193 et 199-200 en particulier.

  15. Novità est aussi associé avec un terme relevant du domaine militaire chez Donato Velluti : « non ci cavalcò, ne fece altre novità » (Cronica domestica di messer Donato Velluti, scritta fra il 1367 e il 1370, I. Del Lungo et G. Volpi éd., Florence, Sansoni, 1914, p. 287).

  16. Sur ce point, je me permets de renvoyer à ma thèse. Parmi les auteurs actifs à la même époque, Ugolino Martelli s’intéresse surtout aux nouvelles mesures fiscales, de même que Matteo Palmieri (qui consacre spécifiquement un livre privé à ces questions).

  17. Monaldi, Guido di Francesco, Diario, R.A. Martini (éd.), in Istorie Pistolesi, ovvero delle cose avvenute in Toscana dall’anno MCCC al MCCCXLVIII, col Diario di G. Monaldi, Florence, Tartini e Franchi, 1733, p. 319-355.

  18. Salviati, Jacopo di Alamanno, Cronica o Memorie dal 1398 al 1411 di Jacopo d’Alamanno Salviati, I. di San Luigi (éd.), Delizie degli Eruditi Toscani, XVIII, 1784, p. 175-361.

  19. Côme de Médicis, Ricordi, G. Ciappelli (éd.), Appendice a « I libri di ricordi dei Medici », in I Medici in rete. Ricerca e progettualità scientifica a proposito dell’archivio Mediceo avanti il Principato, Atti del convegno (Firenze, 18-19 settembre 2000), I. Cotta e F. Klein (éd), Florence, Olschki, 2003, p. 170-177.

  20. Terrino Manovelli, Archivio di Stato di Firenze, Carte strozziane, II serie, 14, f° 3v : « ciaschuno si tornò alle sue istanze sanza alchuno romore o sanghue fare, anzi molto pacifichamente, e quasi tutti i chapi delle chase erano in piazza a piè della ringhiera, e insù la ringhiera cho·lle cioppe indosso sanza punto d’arme, chome si stavano gli altri dì. ».

  21. Côme de Médicis, op. cit., p. 171 : « Et quando furono tracti si cominciò a mormorare che al tempo loro si farebbe novità nella terra; et fummi scripto in Mugello, dove ero stato più mesi per levarmi dalle contese e divisioni che erono nella ciptà, che io tornassi, et così tornai a dì 4 ».

  22. Ibid., p. 172 :  « Niccolò da Tolentino, sentito el caso, a dì 8 venne la mattina con tutta la sua compagnia alla Lastra, et con animo di fare novità nella terra, perché io fussi lasc[i]ato; et così subito che si sentì el caso ne l’Alpe di Romagna, et di più altri luoghi, venne a Lorenzo gran quantità di fanti » ; « Fu confortato el Capitano, e così Lorenzo, a non fare novità, che poteva essere cagione di farmi novità nella persona, et così feciono; et benché chi consigliò questo fussino parenti et amici, et a buon fine, non <fu> buono consiglo; perché se si fussino fa<tti> inanzi, ero libero, et era <su>to cagione di questo restava disfatto. Ma tutto si vuol dire fussi per lo meglo, perché ne seguì maggior bene, et con più mio honore. Non parendo alli amici miei si dovessi far novità, come ho detto, el Capitano si tornò indiretro alle stanze. »

  23. Ibid., p. 175 : « Parveci volere intendere l’animo de’ Signori con dire non volevamo fare contro al volere della Signoria » ; Ibid., p. 176 : « […] da’ Signori fumo ricevuti gratiosamente, et ringratiatoli con quelle parole si richiedeva, vollono che insieme con più altri ciptadini rimanessimo in Palagio con le loro signorie, et così facemo ».

  24. Ibid., p. 176 : « per non fare maggiore tumulto nella Terra ».

  25. Ibid., p. 177 : « la Terra era pacificata, benché continuamente in piazza et in Palazo stessino buon numero di fanti armati per sicurtà del Palagio ».

  26. Ibid., p. 177 : « [… feci…] ridurre el Palagio et la Piaza come solevono stare innanzi alla novità ».

  27. Laurent de Médicis, Memorie in Introduzione in Opere, T. Zanato (éd.), Turin, Einaudi, 1992, p.xxxiii-xxxxix : xxxiii : « fu sostenuto in Palagio Cosimo nostro avolo, con pericolo di pena e supplizio capitale ».

  28. On trouve déjà cette association (avec deux termes désignant des formes légitimes d’exercice du pouvoir communal en des temps extraordinaires) chez Giovanni Rucellai au milieu du XVe siècle (« Nel 1433 sendo la cipttà di Firenze in divisioni cittadinesche ed essendo Bernardo Guadangni gonfaloniere di giustizia, feciono novità et parlamento e balia », Zibaldone Quaresimale, Pérosa éd., Londres, The Warburg Institute, 1960, p. 48), ce qui confirme que la novità appartient bien au champ de l’extraordinaire politique.

  29. À la fin de la période considérée, en 1478, sous la plume de Filippo Strozzi, l’attaque portée à Laurent de Médicis sera à son tour qualifiée de « novità de’ Pazzi », soulignant s’il en était encore besoin la dimension violente, mais aussi contraire aux ordres de la cité, de cet acte.

  30. Jacopo di Niccolò Cocchi-Donati, Zibaldone e Ricordi, in L. Miglio (éd.), « Uffici » e « cortesie » nelle lettere e nelle poesie di un funzionario alla corte medicea, in Studi in onore di Leopoldo Sandri, Rome, Ufficio centrale per i beni archivistici e della Scuola Speciale per Archivisti e Bibliotecari dell’Università di Roma, 1983, p. 583-602 : 599-602 [nous soulignons et traduisons] : « Quand de temps en temps je repense, Pierre, à la grande miséricorde du suprême et véritable Dieu, qui nous a sauvés d’une si manifeste cruauté, j’en reste abasourdi. Puis j’affirme que tout un chacun devrait maintenant glorifier ton immense charité, et ne jamais plus porter atteinte à ta bonté, jusqu’à ce que ton âme quitte ton corps. Ores, parce qu’une sentence certaine et véridique veut que régir justement mérite une plus grande louange qu’une heureuse conquête, que chacun veuille donner sincèrement à tous ses caprices cette direction, s’il ne veut pas voir souvent des nouvelletés. / Par Dieu, ayons cela à l’esprit, car si nous venions une fois à nous égarer, Florence perdrait son bel état. »

  31. Sur cette nouveauté radicale et ses conséquences en matière de réflexion sur les façons de gouverner et de faire la guerre, voir notamment les travaux de Jean-Louis Fournel et Jean-Claude Zancarini.

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